vendredi 30 mars 2012

Mise à jour de "USE : Documentation sur une Europe fédérale"

"Quo vadis Europa ? Telle est donc la question que nous pose une fois de plus l'histoire de notre continent." Joschka Fischer.


Comme les réflexions sur l'Europe et son avenir politique - ou pas - sont cruciales en ce moment, et même si je n'ai pas encore pu faire un commentaire comme je le souhaitais, voici au moins la source annoncée : Le discours fédéraliste de Joschka Fischer à Berlin le 12 mai 2000. Bien sûr, le dossier complet est mis à jour et intègre ce nouveau discours. Petite mise en bouche (A noter que Fischer parle avant l’élargissement effectif à l'Est, et qu'il défend un élargissement "aussi rapide que possible", à une condition, que voici)


"L'élargissement rendra indispensable une réforme fondamentale des institutions européennes.

Comment s'imaginer en effet un Conseil européen à trente chefs d'État et de gouvernement ? Trente présidences? Combien de temps les réunions du Conseil dureront-elles dans ce cas ? Des jours, voire des semaines entières ? Comment parvenir à 30, dans le tissu actuel des institutions de l'Union européenne, à concilier des intérêts différents, à adopter des décisions et encore à agir ? Comment veut-on éviter que l'Union ne perde définitivement toute transparence, que les compromis soient de plus en plus impalpables et étranges, et que l'intérêt manifesté à l'égard de l'Union par ses citoyens ne finisse par tomber bien en dessous de zéro ?

Autant de questions auxquelles toutefois il existe une réponse toute simple: le passage de la Confédération de l'Union à l'entière parlementarisation dans une Fédération européenne que demandait déjà Robert Schuman il y a cinquante ans. Et cela ne veut pas dire moins qu'un parlement européen et un gouvernement, européen lui aussi, qui exercent effectivement le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif au sein de la Fédération. Cette Fédération devra se fonder sur un traité constitutionnel.

Je suis tout à fait conscient des problèmes de procédure et de substance qu'il faudra surmonter jusqu'à la réalisation de cet objectif. Mais il est aussi très clair pour moi que l'Europe ne pourra jouer le rôle qui lui revient dans la compétition économique et politique mondiale que si nous avançons avec courage. Les problèmes du XXIe siècle ne peuvent être résolus avec les peurs et les recettes des XIXe et XXe siècles."

A la question "comment plus d'Europe pourrait bien nous sortir de la crise européenne ?", ce simple extrait montre mon point de vue sur la question : C'est le pas assez d'Europe lorsqu'on a eu besoin qui a conduit à la situation actuelle, et Fischer s'emploie ici à démontrer qu'une fédération est non seulement possible, mais essentielle si l'on souhaite éviter une marche arrière désastreuse et affronter les défis de l'avenir avec optimisme.

Et je vous invite à le lire  ici.

Le sommaire du "Dossier de documentation sur les perspectives d'une Europe fédérale" et les liens.

samedi 24 mars 2012

Plus de musique dans Pax Europæ (Europæ FM #0.5)

MAJ 2019 : Cet article date un peu mais fut, déjà en 2012, une ébauche de discussion sur l'importance de la musique dans Pax. Si vous avez lu les autres Europæ FM et tombez sur ceci en fouinant dans les archives, il y aura des redondances, et peut-êtres des choses un peu différentes, ainsi que des chansons dont je n'ai pas reparlé car apparaissant dans des textes encore non-publiés. Il y aura donc quelques spoilers légers. Et même si ça m'aura démangé, je n'ai pratiquement rien changé à l'article d'origine. On ne peut pas passer sa vie à réviser tout ce qu'on écrit.

Europæ se déroule en 2006, la présence de chansons bien connues est donc non seulement normale, mais nécessaire. Les titres présents dans ce premier texte (chronologiquement parlant) ont donc trois fonctions : 1) Participer à l'ambiance 2) Ancrer le texte dans son contexte 3) D'éventuels symboliques cachées (oui, oui, comme dans Dan Brown !). Je vais donc citer quelques exemples concrets, et expliquer pourquoi ces choix. Car oui, il s'agit de réels choix, qui n'ont pas toujours été évidents.


Prenez "All that Glitters" de Death in Vegas, par exemple. Je suis très fan du groupe, et niveau ambiance il collait parfaitement à une belle journée ensoleillée de l'été 2006. J'étais d'abord parti pour une des pistes les plus rock et entraînantes de l'album que je préfère dans leur discographie : Scorpio Rising. Et finalement, le contexte, à la relecture, m'a imposé un autre titre, plus ancien (de l'album Dead Elvis). Non pas pour des raisons musicales, mais pour son sens. La chanson apparaît alors que Théo et son meilleur ami marchent dans les rues de Strasbourg, il fait beau et sont de bonne humeur, et alors que Théo entend le refrain, il se dit que cela lui rappelle le lycée. Ce souvenir brillant du lycée, ce temps d'insouciance qu'ils partagent (alors que les rouages du Millenium Crash sont déjà en mouvement), ce sentiment de paix et de prospérité qui règne dans Strasbourg (et par extension en Europe), n'est malheureusement pas appelé à durer. Il est bancal, fragile. Et prêt à s'effondrer. C'est pourquoi j'ai remplacé la titre d'origine, qui était juste fun, par "All that glitters" (Tout ce qui brille). Car comme le dit l'adage, tout ce brille n'est pas d'or, et nos personnages ne vont pas tarder à s'en apercevoir. 

Bien entendu, dans un contexte élargi, d'aucun pourrait l'interpréter comme un avertissement sur les États Unis d'Europe qui montent, ou Mouvement Athée qui promet la fin de toutes les guerres par l'abolition des religions. A vous de choisir.

D'ailleurs, en parlant de Mouvement Athée, il y a un groupe qui est cité expressément en référence à la montée à venir de ces fanatiques athées. Ce groupe, c'est Clawfinger, et si je ne cite aucune chanson (je comptais le faire mis ça aurait ressemblé à du placement de produit), c'est Two Sides.




Dans le contexte, Théo lance juste un CD pour se réveiller le matin, et la première chanson de l'album "Clawfinger" c’est justement Two Sides. Alors bon, à l'écoute vous comprendrez pourquoi le groupe fait un excellent réveil, mais j'aurais aussi bien pu choisir Oomph! ou Rammstein.

Les paroles de Two Sides expliquent pourquoi :

There's nothing a god can give to me that I can't give to myself
I put my beliefs in the things I believe and a god can take care of
himself
There's not enough love in the world for me to think about wasting my
time
It's not that I don't believe at all but I don't need a heavenly sign
I can achieve the things I need without getting down on my knees
I can respect your religion but I don't want to pay your fees
I don't want to hear you talk about the things you think that I need
so don't help me back on my feet again until you can hear me plead
Just look in the holy book of crooks and tell me what you can find
All the rules and the regulations made to manipulate your mind
Don't pretend that you're blind just open your mind and study
historical times
The bigger the loss the bigger the cost the bigger the cross and its
crimes

I don't believe in a god that I need to worship
I don't believe that I need to get down on my knees
I don't believe that a voice from above can help me
I only believe in what I can see and the things that I can achieve
 
Whatever belief you belong to there's still always a reason to doubt
and there's always another opinion as to what life is all about
There's always a bigger dimension and a different point of view
so I don't want to try to change you that decision is up to you
Whatever your final choice is and however you choose to live
You'd better be happy for what you can get and happy for what you can
give
There's only one thing to remember there is only one thing you can do
and that is to do unto others as you'd have others do unto you
 
Chorus
Two sides two sides to every story
two stories more makes four new ones to choose
Four sides four sides to every story
four stories more makes eight new ones to choose
Eight sides eight sides to every story
eight stories more now which one should you choose
now which one can you use
 
Chorus


Bref, une chanson sur l'athéisme. Du coup, dans le texte, on ne la cite pas, seulement le groupe, mais c'est cette chanson qui justifie mon choix. Après, certaines chansons sont simplement là pour la bonne humeur, pour résumer l'ambiance générale. Avant que tout ne parte à vau l'eau, on a par exemple du Jamiroquai (aucune chanson citée) ou encore "Il fait beau sur la France" de Matmatah. Cherchez pas de référence cul à coller au texte, c'est surtout le refrain qui donne le ton du contexte été 2006 (avant le Crash ^^).


Je cite également Good Bye My Lover de James Blunt, parce que cette chanson me courait sur le haricot, d'où le "Pitié pas ça !". J'assume, la chanson me gave toujours. (MAJ 2019 : Et NON, je ne l'ajouterai pas à la Playlist Spotify.)

Enfin il y a LA chanson d'Europæ, qui, si l'histoire était transposée en film, serait pour le générique sans aucun doute (après un score suite d'un bon compositeur, quand même). REM "It's the End of the World as we know it (and I feel fine)". 


Cette chanson est très importante et joue un rôle de lien entre Théo et son meilleur ami. Elle traduit plusieurs bouleversements dramatiques dans la vie des personnages principaux, la création des EUE entre autre, mais également le fait que tout s'effondre, le chaos remplace l'ordre, mais l'espoir est présent, et les Étoiles et la Rose des Vents deviennent une nouvelle lueur à l'horizon. Europæ est l'un des rares textes de mon univers qui se conclue sur un quasi happy end (euh... le seul, en fait...). Les États Unis d'Europe sont nés, et le futur est plein de promesses ! (Anecdote : J'ai découvert cette chanson en 2010, durant mon Service Volontaire Européen, en pleine Crise Grecque... et je l'y associe toujours)

vendredi 23 mars 2012

De la musique dans Pax Europæ (Europæ FM #0)

MAJ 2019 : Cet article date un peu mais fut, déjà en 2012, une ébauche de discussion sur l'importance de la musique dans Pax. Si vous avez lu les autres Europæ FM et tombez sur ceci en fouinant dans les archives, il y aura des redondances, et peut-êtres des choses un peu différentes, ainsi que des chansons dont je n'ai pas reparlé car apparaissant dans des textes encore non-publiés. Il y aura donc quelques spoilers légers. Et même si ça m'aura démangé, je n'ai pratiquement rien changé à l'article d'origine. On ne peut pas passer sa vie à réviser tout ce qu'on écrit.

Dans un article précédent, Kevin Kiffer avait commenté : "Pas de Sly ou de Schwarzy dans Pax Europae. Pourtant, on se croirait presque dans un bon vieux film des 80's (la musique qui apparaît dans le récit, les poses classes, l'esprit entre potes)."

C'est une chose à laquelle je n'avais pas vraiment pensé avant. Bien sûr j'avais consciemment inséré des chansons dans le récit, mais cette influence des vieux films de mon enfance ne m'était pas forcément apparue si évidente. J'ai plutôt tendance à penser que je suis majoritairement inspiré par les années 90/00, en particulier pour le visuel, mais cette remarque mérite un petit développement ! La musique apparaît donc dans Pax Europae, mais quelle(s) musique(s) exactement ? Petit tour d'horizon des chansons qui crèvent l'écr... les pages.

Avant tout, précision importante : Beaucoup de chansons apparaissent, tout en étant clairement établi qu'il s'agit de reprises. Certains personnages s'en plaignent d'ailleurs sans vergogne, qu'il n'y a plus d'originalité et qu'on réentend les mêmes soupes encore et encore. Sportzen Morgenstern, un artiste "à la mode", est cité plusieurs fois pour son manque de talent et d'inspiration. Je n'ai pas poussé le vice jusqu'à dire qu'il avait gagné l'eurovision pour être connu mais... l'esprit y est, et je pense que vous avez compris où je voulais en venir sur ce qu'on peut avoir la chance d'entendre sur les radio de grande écoute ^^


Eve of Destruction, de Barry McGuirre, peut-être LA chanson de Pax EU. Hymne anti-guerre période guerre du Vietnam, son texte évoque à la fois le danger d'annihilation mutuelle (on est en pleine guerre froide, je le rappelle pour ceux qui associent seulement Vietnam avec tourisme douteux et excellente nourriture), et surtout, ce qui me touche d'autant plus, l'aveuglement des belligérants et de ceux qui les suivent. Lorsque le chanteur, après avoir décrit le caractère horrible de l'homme révélé par la guerre et absurdité de la guerre nucléaire, demande "Tu ne crois pas à la guerre, mais quelle est cette arme que tu tiens là ? (...) Et tu me dis encore et encore et encore, que tu ne crois pas que nous soyons à l'aube de la destruction", tout est dit. Cette chanson revient à plusieurs reprise et, hors Pax EU, et également un élément central de ma nouvelle "L'Horloge indique Minuit" dans le Mots & Légendes n°2, qui se concentre sur la claustrophobie et la paranoïa de l'attente de la Bombe.


Dans une scène du tome 3, Gaël Vanhamer (qu'on découvrira également amateur de rock des 90's) demande à Omar Tarik de mettre Pleasure, de Iggy Pop, en précisant bien de ne pas lancer une reprise ! Pourquoi Iggy Pop, et pourquoi cette chanson en particulier ? J'avoue que c'est ici principalement une question d'ambiance. J'ai découvert Iggy grâce au film Trainspotting (et Crocodile Dundee II, sans le savoir... sisi, la scène où les punks débarquent chez les trafiquants en bagnole, c'est sur Wild Child !) et cette impression rétro/moderne qui me parlait, cette connexion avec les personnages et la présence de chansons dans la BO comme si Iggy était vraiment là (alors que c'est pas le propos du film du tout), m'a fait une très forte impression. Quand j'ai réfléchis à citer ce qu'écoutaient les gars du Bataillon Furie en permission, Iggy Pop m'a paru évident.

Cela dit, depuis un concert fort mouvementé où j'ai découvert que c'était pas forcément dans des concerts de metal que ça pogotte le plus, j'associe beaucoup plus Iggy Pop à une mêlée furieuse enfumée de cannabis, plutôt que des apparts lugubres encombrés d'héroïne.


De façon générale, la plupart de mes sources musicales citées sont profondément hors du temps par rapport au contexte. Dans "Super État" de Brian Aldiss on cite plusieurs chansons "in-univers", des nouveautés (qui sont, cela dit en passant, nulle à chier apparemment, il semble donc que Aldiss n'ait pas beaucoup plus de considération que moi pour le Top 50 actuel), quand je suis plutôt dans l'optique de citer des choses que le lecteur peut connaître. J'ai tendance à le voir comme un handicap, car ça a peut-être tendance à trop l'ancrer dans le passé, d'un autre côté, ça renforce cette impression diffuse que sur bien des petites choses de la vie quotidienne, les gens ont le sentiment que "c'était mieux avant". On reprend au maximum les tubes de papa et maman, on se goinfre de nostalgie, on se tourne vers le passé. Entendre uniquement des vieilles chanson aide à renforcer ce sentiment qu'il n'y a rien dans le futur et que les gens se retourne vers le passé alors que l'Âge d'Or des États Unis d'Europe touche à sa fin.

Mais le rétro a un autre avantage. Il rock. 


Elvis Presley fait lui aussi plusieurs apparition dans les textes, il fait même office de BO de scène d'action bourrine où les murs volent en éclat, le plafond s'écroule, le sang gicle de partout, mais la chaîne hi-fi tient le coup miraculeusement (là on entre dans l'une de ces scènes "cinématiques" même si quelques persos meurent sans gloire et sans honneur, mais passons). Pourquoi Elvis ? Parce qu'il est cool. Parce que quand on chante "plus de blabla, maintenant on passe à l'action" comme il le fait (même si, dans la chanson, il emballe une nana, c’est pareil) il n'y a rien à ajouter. J'aime beaucoup Elvis, et j'ai écouté certaines chansons en boucle pour certaines scènes de baston, il était donc normal qu'il apparaisse dans l'une d'elle, après tout ! (Hound Dog ou encore Promised Land feraient d'excellentes pistes dans une partie de JDR Pax EU, d'ailleurs... Avis aux amateurs de bière cheap au White Fire !)

Enfin, et parce qu'il le fallait, il y a également une autre scène de combat où la musique est littéralement présente dans l'action par le truchement de l'intrigue. Pas seulement parce que c'était une scène héroïque - même si ça aide - mais aussi parce que l'un des personnages principaux, Marc "Balder" Dean, commence enfin à prendre son envol, à se débarrasser d'un poids qui l'empêchait d'évoluer après sa rupture avec ses amis, et parce que les Européens arrivent à reprendre le terrain en se regroupant (j'explicite la symbolique de façon assez grossière), pour toutes ces raisons, et peut-être aussi accessoirement parce que cette musique est l'Hymne Européen, j'ai placé l'Hymne à la joie de Beethoven.


Pour rappel, l'Hymne Européen n’est qu'un segment de la symphonie, et n'a aucunes paroles officielles (ni en allemand, ni en latin, ni rien, c'est la version réorchestrée de cette vidéo). Dans mon univers, le problèmes des langues étant contourné par la création de l'européos, la langue européenne, cet hymne a bel et bien un texte, mais dans la scène d'action dont il est question, un soldat Européen créé diversion avec une chaîne hi-fi et déclenche, avec l’œuvre originale chantée en allemand, un chant spontané (en européos) qui va mettre l'ennemi... un peu mal à l'aise ^^


Le prochain article sera la suite directe de celui-ci mais concernera Europae qui, comparé au reste, a beaucoup plus de références musicales concentrées en 160 pages !

jeudi 8 mars 2012

Chronique Rôliste n°1 : Back in Businæss.


Partie du 25/02/2012
Pax Europæ, Florent en parle ici depuis un moment, tout en évoquant au détour d'un billet militant le Jeu de Rôle en développement autour de cet univers. Récemment, les parties test ont repris grâce à Rolisteam, logiciel libre et gratuit permettant de simuler des parties de jeu de rôle en ligne. L'éloignement géographique de fait supprimé, le développement quelque peu ralenti est donc reparti, on l'espère, sur de bons rails. Et nous n'allions tout de même pas garder pour nous les moments de gloire (ou de solitude) de ces parties... Cette nouvelle rubrique est donc là pour vous les faire partager ! Vous pourrez ainsi suivre avec nous, créateur, collaborateurs, et bêta-testeurs de Pax Europæ, les évolutions et développements de ce fameux jeu de rôle !
A propos, mon nom de code est bizarman, bêta lecteur, testeur et contributeur de Pax EU, et c'est à mon ego surdimensionné qu'a été confiée la délicate mission de rédiger la chronique du jour.

Le scénario joué était sans grande prétention – l'objectif était autant de relancer la machine que d'apprendre à maîtriser le logiciel, assez intuitif mais recelant nombre de petites subtilités qu'il vaut mieux apprendre par la pratique. Un one-shot préparé par Florent en une nuit nous permit néanmoins de passer un très bon moment, et de tester plusieurs mécanismes introduits récemment dans le système de jeu, et non encore mis à l'épreuve, par exemple le saut en parachute et une nouvelle règle sur les jets de minage/déminage. Le système d'amélioration des compétences et de gestion de l'expérience, lui aussi peaufiné récemment, nécessitera une petite campagne pour être testé sur la durée.
Ont participé à la mission :

-Lt Märinen, PNJ dirigeant la mission, contrôlé par Florent, également MJ pour la session.
-Alonzo Pedrescu, Fantassin, Soldat Dormant (aka réserviste), camionneur dans le civil et ayant donc pour principales compétences le pilotage et la mécanique. Un peu inquiet de repartir en mission derrière les lignes ennemies. Utile pour se déplacer et s'enfuir, mais à couvrir... Joué par Nico.
-Jones Mc Ouille, Sniper, fumeur invétéré, optimisé pour couvrir nos arrières. Joué par Galadas, nouveau venu découvrant le jeu et l'univers. Très bon baromètre pour repérer les points confus dans les règles, donc.
-Zolf J. Kimblee, Grenadier, spécialiste en explosifs et armement, qui... aime son boulot de façon légèrement malsaine (un peu moins que le personnage d'un célèbre manga auquel le nom a été éhontément emprunté). Principale force de destruction pour la mission. Joué par moi même, bizarman si vous ne suiviez pas. 
Nous avions tous, outre notre spécialisation de base, la formation avancée commando-parachutiste, octroyant un bonus de 5 points à répartir dans nos différentes statistiques et compétences. Devenir commando para nécessite en théorie beaucoup d'expérience, mais il fallait bien tester le saut en parachute... sans que l'on se casse tous la jambe au premier jet.
Le vif du sujet :
Le Lt Märinen nous a convoqué, Alonzo, Jones, et moi, en briefing, prêt à nous confier une périlleuse mission d'infiltration derrière les lignes Russes. En effet, depuis le début de l'an 2034, ces derniers ne cessent de progresser sur les territoires des Régions Nord des Etats-Unis d'Europe, et il serait peut être temps de leur montrer à qui appartient ce continent. En plus, ils semblent préparer un mauvais coup : nos services de renseignements ont remarqué que les buveurs de vodka installaient des bases secrètes dans des endroits reculés et discrets, en Laponie par exemple... Et nous savons de source sûre qu'ils y mettent en place des émetteurs. Prépareraient-ils une cyber-attaque de grande envergure ? Peu importe pour nous : parachutés de nuit derrière les lignes russes, notre mission sera de repérer, d'infiltrer et de détruire l'une de ces bases. Depuis la zone de largage, le centre en question sera accessible par deux ponts construits par l'ennemi, et il serait judicieux qu'il n'en profite plus après notre départ... Jones et Alonzo obtiennent confirmation que le temps devrait être dégagé, malgré la probable présence de brouillard de guerre. Oh, et bien sûr, c'est en Laponie qu'on nous débarque, il va faire frisquet dans les bois enneigés ! Le briefing se termine dans une ambiance relativement détendue, bien que le lieutenant doive couper court à mes fanfaronnades qui, si appliquées, risquent de faire muter les survivants au Bataillon Léonidas...
Nous rejoignons alors la Furie d'assaut sur le tarmac, et la sphère de Kalanium s'élève vers le ciel, nous conduisant plus vite que nous le souhaiterions vers l'objectif.
C'est en se rapprochant que des inquiétudes apparaissent dans le groupe : Alonzo commence à paniquer à l'approche de la mission et nos tentatives pour le calmer ne sont pas des plus fructueuses...
Et c'est au moment de sauter que le premier problème apparaît : le stress ambiant oblige Alonzo à faire un jet de sang-froid... qu'il rate. Contrairement à ses compagnons, plus sereins (et formés pour ça) et qui n'ont qu'à contrôler leur descente, Alonzo panique et se retrouve bloqué devant le gouffre béant de la soute ! Il faut alors toute la diplomatie du lieutenant, qui fait appel à son charisme comme à son sens de la psychologie, pour convaincre Alonzo que c'est un travail d'équipe, qu'il se bat pour l'Europe, et qu'une formation de commando-para, ça ne s'oublie pas ! Convaincu, notre compagnon, réalise le saut et réussit les jets qui le mènent sain et sauf sur l'aire de largage avec nous. Quand Florent a rédigé les règles du saut en parachute, je craignais qu'elle ne favorisent des fractures multiples pour tous en début de partie, ce qui aurait été pour le moins... anticlimatique.
Le parachute caché, par la neige et les branchages, nous repérons les lieux et nous ne pouvons que constater la présence d'un épais brouillard de guerre.
Bon, nous sommes à présent cachés dans la forêt, et la carte incomplète fournie par les renseignements nous indique l'emplacement des deux ponts, menant théoriquement à notre objectif. Le pont n°1, le plus au Nord, devrait être le moins gardé, mais il est entouré par une zone entièrement découverte. Le second est juste à l'entrée de la base, mais doit logiquement grouiller de défenseurs. Nous décidons alors de nous séparer en deux groupes pour piéger les deux ponts au même moment, plan que j'accepte après une petite réticence. Le premier groupe sera composé de Jones et Alonzo, et s'occupera du pont 1, le second de moi et du lieutenant. Bien entendu (avantage par rapport aux univers de fantasy!) les deux groupes resteront en communication permanente par micro-casque. A intervalles réguliers, nous évaluons si la voie est libre par des jets de perception. Jusqu'au pont, pas d'opposition ou de patrouille. Les raids précédents des forces spéciales ont dû faire un peu de ménage...
En chemin, Jones et Alonzo tombent grâce à un jet de perception réussi sur un grand cube de métal noir, qu'un examen plus poussé permet d'identifier comme un générateur de brouillard de guerre. Le lieutenant coupe court à la curiosité de Jones, qui souhaiterait étudier et recueillir des données sur l'objet « -et pourquoi pas y organiser un pique-nique ! ». Il serait plus sage de le détruire, mais un sabotage trop brutal préviendra les Russes de notre présence tout en faisant disparaître le brouillard qui nous cache également. Je suggère alors de saboter le générateur de façon à faire croire à une panne, ce qui poussera l'ennemi à envoyer des troupes pour vérifier le matériel ; ainsi la garde d'un des deux ponts (vraisemblablement, le n°1, le plus proche) se retrouvera réduite, ce qui facilitera notre infiltration et la pose des explosifs télécommandés visant à le détruire.
Le plan est approuvé et Alonzo réussit brillamment son jet, le générateur cesse donc de cracher son brouillard pendant que les deux saboteurs s'avancent vers le pont, toujours couverts par la brume se dissipant rapidement.
Une fois arrivés au pont, nos deux héros aperçoivent les sentinelles, et constatent vite qu'il y a du mouvement, les gardes dépêchant un half-track dans la direction du générateur. Apparemment, la ruse a fonctionné.
C'est donc l'occasion rêvée pour saboter le pont sans être démasqué, action que Jones Mc Ouille réussit brillamment. Ne voulant tâter de l'eau froide, il traverse en se suspendant à la structure du pont, alors que le plus sage et moins confiant Alonzo préfère nager dans le flux glacé. Les voilà de l'autre côté, incroyable, cette mission d'infiltration se passe, eh bien... sans dégénérer en grosse bataille sanglante, une véritable mission d'infiltration, quoi.
Oui, un pont à saboter, une rivière franchie à la nage et un JDR habituellement rempli de bras-cassés, je sais à quoi vous pensez...
Mais pendant ce temps, des choses terribles se trament au pont 2. Zolf, c'est à dire moi, avance accompagné du lieutenant vers l'orée des bois... déjà, il est possible d'entrapercevoir l'ennemi, qui ne semble pas nous avoir repéré. Confiant, j'avance résolument mais avec classe et discrétion vers l'objectif... de plus en plus près... l'ennemi ne m'a toujours pas vu, et je suis déjà sous le pont ! Et un char ennemi à passé ledit pont, en direction du générateur détruit, l'ennemi s'attend donc à une attaque par les bois, parfait ! C'est le moment de réussir la pose des explosifs, sang-froid et art de la démolition... et encore une fois, la manipulation se passe sans encombre. Décidément, il y a de quoi me motiver à aller de l'avant, me voici en un clin d'œil sur la rive opposée, le lieutenant sur mes talons... Le MJ m’interrompt alors ! « euh, tu devrais faire un jet de perception... » (note du MJ : Après avoir également suggéré de ne pas se précipiter, hein... mais non, c'est l'Eurocorps, ce sont des professionnels !) Je suis déjà bien engagé sur la rive, à deux pas de l'entrée... et je foire le jet. Méchamment. En plus, je n'ai guère plus de chance en réessayant quelques pas plus loin... Au final, mon personnage subitement frappé de myopie, voit devant ses yeux béats et horrifiés se révéler la défense du pont et de l'entrée de la base, prête à le réduire en charpie en même temps que son infortuné lieutenant : Trois soldats nous encerclent, et un nid de mitrailleuse (juste sous mon nez !!! comment ai-je pu le rater!) m’annonce par un cliquetis menaçant mon trépas prochain et inéluctable...
Mais au pont 1, les choses se gâtent également. Le brouillard peine à se dissiper, mais Jones et Alonzo avancent désormais à découvert, et les Russes que notre ruse avaient dispersés commencent à nouveau à se regrouper en direction du pont. Là, nos deux vaillants soldats vont tomber sur ce qui mettra définitivement un terme à la partie « discrète » de la mission.  Un second générateur de brouillard se dresse devant eux. Bah, il n'y a qu'à le saboter comme le premier, Alonzo /Nico est le meilleur mécanicien du groupe, il peut s'en charger... Échec critique. « euh, c'est normal, ce bruit ? » 
Le MJ.
Un sifflement strident indique aux deux saboteurs du dimanche qu'il serait temps de déguerpir aussi vite que leurs jambes peuvent les porter... Cette action très censée les sauve de l'explosion spectaculaire du cube métallique, pour les propulser... droit sur une grille électrifiée. Et oui, ça ne manque pas, Jones se la prend en pleine face... ça doit piquer ! Et avec ce boucan, le Half track du pont (équipé d'une mitrailleuse, je le rappelle) fait mouvement vers les intrus, précédant les sentinelles alertées. Plus qu'à courir vers le Nord, en espérant trouver la seconde entrée... ah oui, c'est ici, juste derrière le garde avec sa mitrailleuse lourde... argh. Garde devant, renforts derrière... la décision est vite prise, on élimine d'abord le garde. Alonzo panique et tire n'importe comment, sans blesser quoi que ce soit... Heureusement, notre sniper est plus posé, et son Famas G3 renvoie rapidement sa cible dans le néant. Mais le camion, rempli d'ennemis, se rapproche toujours.

Et qu'advient-il des bien mal partis Zolf et Lt Märrinen ? Et bien, comme pour toute situation de combat généralisé, il faut tirer l'initiative des belligérants... Ah, trois russes attaquent avant nous. Dont celui à la mitrailleuse lourde. Il ne se prive pas et la rafale me met à genoux, à quelques PV seulement du seuil de douleur (l'évanouissement). Le lieutenant n'est pas plus chanceux et il tombe (mort ? Seulement inconscient?) sous les rafales des deux ennemis suivants. En plus, ils ont roll de hauts dégâts. Le dernier russe a tiré la même initiative que moi, un dé 6 nous départage... à l'avantage de l'ennemi. « Non, pas question que ma vie s’achève de façon aussi minable !  J'INVOQUE L'OPTION PACK DE BIERE ! » Il s'agit là d'une Action Spéciale, prévue pour sortir les joueurs des situations désespérées (comme celle-ci... et une seule fois par personnage et par session de jeu). Irréaliste, cinématographique, mais diablement classe... à condition de réussir le jet la validant. 
La bière de Chuck Norris : Sort le héros de la merde depuis "Œil pour Œil".
Ça passe. Mon personnage voit donc apparaître miraculeusement sous la neige le fameux Pack de Bière de Chuck Norris : son pouvoir régénérateur me maintient donc à 2 PV du seuil de douleur pour toute cette séquence d'action. En clair, je suis temporairement invincible. Mon tour, fini la subtilité et la discrétion : j'arme mon lanceur, et j'achève le nid de mitrailleuse d'une grenade K (la plus puissante à ma disposition), le transformant sur le coup en un joli cratère. J'absorbe sans broncher les rafales des gardes qui reculent terrifiés vers le pont alors que le char revient dans ma direction... Qu'importe, après tout, le pont a été piégé par mes soins, il est plus que temps de déclencher le feu d'artifice. Parce que je tente infructueusement d'évacuer le lieutenant (peut être pas mort) vers un couvert, je ne déchaîne pas l'enfer comme je le voudrais, debout et me riant de l'ennemi à la lueur d'une apocalyptique boule de feu, mais bien à plat ventre dans la neige. (j'aurai peut être dû mettre plus de points en Constitution...) Pour les Russes, le résultat est le même, char et défenseurs sont précipités dans les flots - gageons que les poissons de l'extrême-nord européen aiment leur viande bien grillée. 
 
A ce moment là, j'ai malheureusement dû quitter la partie. Mon personnage s'est donc éteint, terrassé par les nombreuses rafales qu'il avait encaissé, le sourire aux lèvres après son action d'éclat - certain que l'Europe ne peut que triompher de l'adversité. Dommage pour le lieutenant également, pauvre PNJ mourant que personne n'a pu secourir...

Mais revenons aux vrais héros, ceux qui pour l'instant survivent, et voient toujours arriver un Half-track furieux dans leur direction. A cette distance, seul le sniper a une chance d'arrêter le HT en provoquant la mort brutale et violente du chauffeur d'une balle bien placée. Premier tir... échec, et le véhicule se rapproche de plus en plus. Second tir... HEADSHOT ! Le Half-track ne s'arrête pas pour autant, et fuse vers l'ancien nid de mitrailleuse, défonçant les sacs de sable d'un choc sourd. Alonzo et Jones s'assurent des éventuels passagers avant qu'ils ne se ressaisissent : pas question de leur laisser l'occasion de se défendre, une grenade flash-bang pour les paralyser pendant qu'on les élimine au pistolet... pas très honorable, mais en temps de guerre, l'efficacité prime...

Le camion et ses occupants hors service, voilà qui laisse un peu de temps à nos deux survivants pour explorer la base. Pas de difficultés apparente malgré l'alarme, une grosse antenne dans la cour n'attend que d'être sabotée, et les hélicoptères Skot immobiles attendent sagement leurs pilotes. Pas question de s'éterniser après deux morts et une armée de Russes prête à tomber sur les deux survivants de la mission : l'antenne doit sauter, et une grenade K lancée sur le tarmac devrait limiter considérablement la probabilité que les hélicos ne décollent et engagent la poursuite. Les dés sont du côté de Jones et Alonzo après nos déboires précédentes, et l'antenne relais détruite, il faut fuir ! Ce camion garé devant la base a échappé aux explosions, il semble parfait, Alonzo va pouvoir exercer son expertise au pilotage de véhicules terrestres, tandis que Jones (qui a hâte de pouvoir en griller une) le couvrira grâce à la mitrailleuse défensive du véhicule branlant. Mais l'arrivée un nouveau char pourrait réduire en charpie tant leurs espoirs que leurs personnes physiques. Jones connaissant bien ce type de tank, il sait exactement où viser pour éliminer son pilote : la petite fenêtre sur le devant... Jet difficile s'il en est, et une très bonne performance ne suffit pas à atteindre le pilote, qui entend ricocher la balle inutile au dessus de sa tête.S'en suit une fuite dans la base pour attirer le blindé dans la mauvaise direction et libérer le passage, ainsi que la destruction vite-fait bien fait-fait des hélicoptères que les pilotes, réveillés un peu brutalement, n'auront pas l'occasion d'utiliser pour poursuivre nos héros. Ces-derniers parviennent enfin à rejoindre leur espoir de délivrance et Alonzo s'occupe de démarrer le véhicule, like a boss.
Une séquence épique de fuite s'engage au son crachotant du moteur russe de qualité douteuse. Le camion se rue à l'assaut du pont 1, et Jones/Galadas élimine avec diligence tout soldat ennemi osant s'approcher du camion... Et déjà, le pont est derrière, ce qui donne le signal du dernier feu d'artifice de la session : ces explosifs qui ont été placés au début... à leur tour d'expédier les restes cramés des derniers poursuivants au fond de la rivière ! Ponts détruit, antenne relais neutralisée, et lourdes pertes pour l'ennemi... Bien que le temps ait manqué pour explorer la base et découvrir ses secrets, et que notre technique d'infiltration se soit montrée d'une efficacité douteuse, Jones et Alonzo peuvent considérer la mission comme un succès alors qu'ils atteignent le point de récupération prévu. Leur Furie les emmène vers une bonne cigarette, et une soirée dans un bar*, à la santé des deux malheureux compagnons ayant perdu la vie pour le triomphe de l'Europe.
*Mais pas le White Fire. (le jour où on vous expliquera cette private joke, vous le regretterez. Nous aussi, probablement)
Bilan :

Une bonne petite partie pour se remettre dans le bain, qui nous a permis de repérer les points obscurs des règles, et de mieux maîtriser Rôlisteam.
Au niveau du déroulement en lui même, les dés (et l'imprudence de certains, je ne me nommerai pas) nous ont certes joué des tours bien qu'une grande partie de la mission soit un succès. Si nous n'avions pas passé tant de temps à chercher comment nous infiltrer au delà des ponts, l'intérieur de la base nous aurait posé un challenge de taille. Nous aurions alors pu découvrir le véritable but de ces bases secrètes : le contrôle de véhicules Russes High-tech, les Miest, pilotés à distance et prêts à inonder le front européen. Évidemment, l'un d'entre eux nous attendait bien au chaud dans son hangar, et il aurait fallu tout notre savoir faire pour l'éliminer et neutraliser son pilote, caché dans la base. Mais tels sont les aléas du JdR, où rien ne se passe jamais comme prévu...

Pour finir, merci à tous les participants à cette session, prélude à de nombreuses parties tests endiablées... Les moments épiques, les échecs pitoyables et l'humour plus ou moins volontaire des joueurs de ces futures parties de Pax Europae, nous vous les communiquerons dans nos prochaines chroniques rôlistiques ! Rompez !

dimanche 4 mars 2012

Super Etat, de Brian Aldiss, ou les androïdes rêvent-ils de l’Union Européenne ?

EDIT : En fin d'article, je souhaiterai vous mettre à contribution, merci ! ^^

Il y a quelques années, je me suis vu offrir par un ami la traduction du roman de Brian Aldiss « Super État, l’Union Européenne dans quarante ans ». Le sujet est prometteur, d’autant qu’Aldiss a sa réputation et que la projection se veut critique sociale, plutôt que politique. Avant toute chose, je vais tenter de ne pas trop dévoiler de l’intrigue, mais fort est de constater que si je veux parler du livre, il va me falloir traiter de la majorité de l’intrigue. De toute façon, je ne félicite pas  les Éditions Métailié qui racontent déjà presque tout sur la quatrième de couverture, notamment la conclusion d’une « intrigue » qui monte en pression dans le livre et dont la conclusion, quelques pages avant la fin, se trouve dans le résumé. Un grand anti-bravo, donc. Mais le roman lui-même, qu’en est-il ?

Très difficile de répondre à cette question, tant l’ouvrage est déroutant. Bien qu’une intrigue centrale existe et se développe au fur et à mesure par petites touches pour former un tout à peu près homogène, sa rédaction sous forme de scénettes donne trop souvent l’impression de suivre une succession de sketchs ou de tableaux qui s’enfilent comme de perles sur un collier et dont on ne voit pas toujours l’intérêt (et honnêtement, certaines scènes n’en ont pas vraiment). Le lecteur est donc partagé entre l’inconsciente mais constante question « Où il veut en venir avec tout ça ? », et la satisfaction de voir la majorité des éléments s’imbriquer dans un puzzle compréhensible. Pourquoi l’effet n’est-il donc pas complètement réussi de mon point de vue ? Je suppose que cela tient à l’humour d’Aldiss qui se veut pince sans rire, noire ou cynique. Et bien que je n’ai aucun problème avec ça, bien au contraire, j’ai souvent eu la désagréable sensation de comprendre ce que je devrais trouver drôle sans parvenir à m’arracher moi-même un sourire de connivence pour marquer le coup. A mon sens, Aldiss force parfois bien trop le trait pour rester drôle, mais cela dépend de ses thématiques.

Plusieurs grands thèmes sociaux sont développés dans « Super Etat ». L’Europe, au final, est loin d’être l’un des plus importants, et donc des plus développés. En gros, l’Union Européenne est devenue un… super Etat, sans rire, dont la capitale est Bruxelles mais dont le Parlement est toujours réparti entre la capitale belge et Strasbourg. Bien que le continent soit très clairement complètement intégré, on ne parle cependant jamais de fédération, l’UE reste l’UE. Une monnaie mondiale existe, l’univ, ainsi qu’un nouveau réseau cognitif, j’y reviendrai plus tard. Cependant, Aldiss tire à boulet rouge sur l’idiocratie des élites corrompues par l’argent, le pouvoir et les médias, à grand renfort de perversions et de décadences (comme durant le mariage du fils du président où un androïde remplace la mariée, absente pour des raisons climatiques). Dans cette Europe qui s’écroule sous son propre poids, et surtout le poids de son appauvrissement intellectuel, une galerie de personnage vit sa vie. Certains préparent la guerre contre le Tébarou, petit pays musulman aux confins de la Chine, d’autres tentent de trouver des réponses sur la Vie, l’univers et le reste sans parvenir à trouver 42, permettant à l’auteur de critiquer en vrac l’absurdité des fanatismes religieux, voire des religions tout court, l’autophagie du capitalisme, le nihilisme de la xénophobie… bref, les lieux communs de la critique sociale. Alors autant, lorsqu’il dépeint les relations familiales modernes, je trouve qu’il s’y prend assez bien (familles recomposées plusieurs fois, mort imminente d’un proche ou de soi-même, bilan sur sa vie, etc.), autant lorsqu’il veut nous dire de nous aimer, que le racisme c’est mal et que la guerre ne sert à rien, j’aimerai qu’il arrête de prendre ses lecteurs pour des demeurés avec son insistance pesante et ses clichés lourdingues (le général Fairstepps c’est tout un programme). D’un autre côté, et à sa décharge, il a publié son livre en 2002, dans un climat où les US et la Grande-Bretagne s’apprêtaient à foncer tête baissée en Irak malgré les problèmes déjà rencontrés en Afghanistan (qui est, grosso modo le Tébarou). Si on place son livre en plaidoyer contre ce genre d’intervention dans ce contexte précis, je veux bien être tolérant. Mais tout de même, un peu de subtilité, que diable !

Outre blâmer la guerre et le capitalisme sans subtilité, Brian Aldiss a quand même de (très) bons moments. Il introduit par exemple les Foudéments, un groupe de hackers terroristes qui parasitent les canaux de l’Ambient – le nouveau réseau bioélectrique – pour diffuser des messages dans un ton théâtral et pompeux qui, lu aujourd’hui, ne peut qu’évoquer les Anonymous, ce qui a ajouté une saveur toute particulière à ma relecture ! Leur façon de proclamer de grandes vérités sur la corruption du monde pour créer chaos et confusion – sans jamais proposer une seule alternative concrète – est tout simplement délicieuse et vraiment, je pouvais presque voir le masque de Guy Fawkes. Extrait raccourcis (le passage est assez long) de leur première intervention :

« Foudéments : Prologue. Nous faisons nos courses dans des magasins où tout, surtout les produits bon marché, est trop cher. Au moins, nous vivons dans un monde libre… nous sommes libres de faire semblant d’être heureux. C’est la bouche qui parle ; le cerveau ne tient aucun compte de la bouche. (…) Tous les hommes se sentent isolés. Ils ne sont pas seuls dans ce cas. (…) Telle est la conclusion de notre premier message. Attendez la suite. »
"Nous croyons que la société est la cause de nos souffrances intérieures, mais ce sont nos souffrances intérieures qui ont créé nos sociétés" Message piraté des Foudéments p43. Admettez qu'a posteriori y a comme un relent.

Même la fin, on croirait le désormais célèbre « Expect us ». Bref, a posteriori, les Foudéments sont devenus, d’une bonne idée narrative, un élément véridique de notre société qui prouve que, malgré ses exagérations parfois indigestes, Aldiss a quand même bien cerné les décades à venir.

Autre idée intéressante, la technologie décrite. Il faut bien comprendre ce qui fait la différence entre « The Aachen Memorandum » ou « United States of Europe » et « Super État ». Brian Aldiss a décidé de jouer à fond la carte de la fable utopique, ce qui se sent (trop ?) dans sa narration. Le style se veut très proche d’Huxley (à qui il dédie son livre par ailleurs), les dialogues sont souvent alambiqués ou absurdes, et à aucun moment l’auteur n’essaye de nous persuader que cette conversation pourrait réellement avoir lieu. Tout est image, projection, métaphore, et donc non réaliste. Je dois dire que cela marche moins bien que dans Le Meilleur des Mondes, justement parce qu’il en fait trop dans sa volonté de se « placer dans l’héritage ». Toutefois, cette approche permet des élans de vraie SF que n’ont pas Aachen ou USE, comme la présence non-anecdotique d’androïdes qui ne cessent de se poser des questions – candides, à cause de leur programmation – sur l’espèce humaine et ses paradoxes, comme une sorte de rappel innocent au milieu de ces portraits cyniques. On notera néanmoins que l’un d’eux est un gros pourri cynique lui-même, à l’image de son maître autoproclamé « visage du capitalisme » qui produit des films de merde, qu’il sait excessivement mauvais, juste parce qu’il peut se le permettre (une grosse enflure, donc, au cas où ce ne serait pas évident). Les androïdes offrent une piste référentielle intéressante, bien qu’ils ne soient à mon sens pas assez exploités. Dommage, car un texte mêlant Union Européenne et androïdes philosophes, c’est quand même couillu !

L’Ambient m’a également beaucoup plu. Il s’agit d’un réseau bioélectrique qui connecte tout le monde en permanence par la pensée – même plus besoin de taper sur des touches ou parler ! Confort et praticité ! Connexion permanente ! Et aussi flemme de parler et de communiquer, spam permanent de publicités mentales… et de messages pirates de Foudéments, bien sûr. A l’heure où de plus en plus de gens ne quittent même plus Facebook sur leurs portables et postent sur Tweeter le menu de leur pause déjeuner, j’ai trouvé cette réflexion très piquante également, bien qu’encore fois pas assez développée en comparaison du message la-guerre-c’est-mal-l’intolérance-c’est-injuste, dont un tiers des scénettes qui lui sont consacrées sont à mon sens redondantes et dé-servent le propos par leur caricature.

A noter également que cette fameuse narration par tableau, même lorsqu’elle est décousue, n’offre aucune pause tout au long des 220 pages du livre. Pas de chapitres, seulement une succession de scènes sur plus de 200 pages ! Je dois admettre qu’autant cela peut devenir très addictif lorsque les passages sont bons, autant il m’est arrivé de trouver le récit épuisant.

Ce que je reprocherais à « Super État » ce n’est pas finalement un manque d’idées, mais une exploitation médiocre du potentiel. Si la lecture est globalement bonne et offre quelques bons moments d’humour acide et pince-sans-rire, j’ai eu trop souvent le sentiment qu’on passait à côté de bonnes choses et de traitements originaux au profit de démonstrations éculées sur le réchauffement climatique, le multiculturalisme et le racisme (absolument aucune innovation de ce côté-là, si ce n’est qu’au politiquement correct s’ajoute une touche blasée qui elle, en revanche, permet une conclusion un peu moins happy happy que d’ordinaire). L’arc sur le peintre irlandais et la valeur de l’art – et par extension de l’artiste – est une branche de l’argumentaire anti-ultra-libéral que j’aurais préféré voir développer, par exemple. D’ailleurs, cette impression a été beaucoup plus forte à la relecture que lors de ma découverte initiale du récit. Cela dit, ça reste une lecture intéressante, d’autant que ce genre de sujet est rarement traduit en français ! Et la caricature de la bobo européenne blasée qui trouve un réconfort spirituel chez un gourou indien via l’Ambient, ou encore les commentaires éclairés de passants « pris sur le vif » concernant l’actualité valent tout de même leur pesant de cacahuètes !


PS : Je ne développerai la thématique du voyage spatial vers Europe, la quatrième de couverture couvre déjà amplement le sujet (oui, je le rumine, celui-là !) Prochain roman sur une Europe du futur inscris sur ma liste : « Incompetence » de Rob Grant !

Le livre sur amazon.fr, et pour ceux qui préfèrent la version originale, le roman s'appelle "Super State, a novel of the European Union forty years hence".

EDIT : Je continue de rechercher des romans ou nouvelles sur le thème de l'Europe fédérale, des États Unis d'Europe, ou de l'Union Européenne du futur, afin de continuer à comparer ce qui se fait dans ce registre ! Après "Incompetence" je m'attaquerai à "l'Ange de l'Abîme" de Pierre Bordage, et un autre roman que je garde encore surprise car il sera probablement nul et pratiquement hors-sujet, mais que je me dois de lire. Seulement voilà, après ça, ma liste de lecture est épuisée ( ça aura fait 6 romans, dont 5 anglo-saxons, incluant une seule traduction, et un seul livre français... aïe.) Je cherche donc d'autres textes de fiction traitant de l'Europe du futur, comme évolution de l'Union actuelle ( en fédération ou pas ). Long, courts, en anglais, en français ou en allemand, peu importe ! Si vous en connaissez, faites-le moi savoir :-) Merci beaucoup !