mardi 11 janvier 2011

De la Guerre Nucléaire dans Pax Europae ( suite ), ou de mon approche de l'Hiver Nucléaire

J'ai déjà évoqué le sujet de la Guerre Nucléaire dans l'univers PE, mais il y a quelques éléments qui méritent d'être développés par rapport à l'article original. Inaugurons donc 2011 avec un post un peu plus consistant qu'une Mise à Jour !

L'élément qui mériterai à mon sens d'être creusé pour une bonne compréhension de mes textes dans ce domaine est l'Hiver Nucléaire. J'ai lu encore récemment un article de journal assez perturbant sur un rapport de Castro fils qui depuis Cuba nous avertit des nouvelles armes nucléaires américaines et du danger d'une intervention au Moyen Orient avec ces nouveaux missiles censés limiter les dommages collatéraux blablabla le tout se concluant sur les dangers de l'hiver nucléaire guettant l'humanité si on décidait de rayer l'Iran à coups de Nukes. Précisons que ce scénario implique un consentement des pays voisins ( possible si on accepte de faire confiance à WikiLeaks comme source pour confirmer ce que tout le monde sait déjà : l'Iran est au monde arabe ce que la Corée du Nord est à la Chine, un boulet ) et impliquant également les puissances nucléaires de la, ahem, "région" (Pakistan, OK, Inde, euh... non allons épelucher le raisonnement ) Bref, lire cet article m'a passablement gonflé sur bien des points et m'a renvoyé à mes propres choix scénaristiques, leurs incohérences et leurs lacunes. Je me suis amusé à comparer ces deux programmes de Fin du Monde, c'est très amusant.

Le scénario Castro est bien alléachant sur le papier : Intervention occidentale en Iran, forces nucléaires déployées car, tout le monde est censé le savoir apparemment, face à cette population intégralement  endoctrinée et farouchement anti-occidentale ( je suppose qu'à l'heure de la rédaction du rapport les révoltes étudiantes n'avaient pas encore lieu ou n'étaient pas diffusées à Cuba ) les armes conventionnelles seraient inutiles et inopérantes. M'aurait-on dit : le terrain est plus proche de l'Afghanistan que de l'Irak, voyez le résultat dans les exemples sus-cités, j'aurais été plus convaincu. Mais soit, l'Occident utilise la Bombe nouvelle génération pour en mettre plein la gueule aux Barbus. Simple comme le postulat d'un Chuck Norris ( mais rappelons-nous qu'on est déjà parti en guerre avec moins de plan que ça ). Pourquoi l'Inde et le Pakistan interviendraient et déploieraient leur arsenal nucléaire censé être "suffisant pour provoquer un terrible hiver nucléaire" ? L'article ne le révélait pas, j'ai dû jouer aux devinettes. Alors :

1) Le Pakistan abandonne la ligne officielle de lutte contre l'Islamisme et soutient l'Iran, réplique sur les forces occidentales, l'Inde se range aux côtés des USA et ses amis qui ripostent à leur tour ( on imagine la Chine et la Russie crier "Bingo" en sabrant le champ' après tant d'années à entretenir un stock qui coûte cher au point de négocier encore et encore sa réduction ). Apocalypse nucléaire, hiver nucléaire pour 20 ans, 80 à 90 % des éspèces animales et végétales disparaissent ( et pas de bol pour les 10 à 20 % qui restent, y aura sans doute encore des humains ). It's the End of the World as we know it !! ( And I feel Fiiiiine !)

2) Les Talibans déjà bien infiltrés renversent le gouvernement officiel dans une insurrection géante ( Afghanistan et Irak inside naturellement, la fête est plus folle ) et sont assez cons pour appliquer le scénario numéro 1.

3) Inde et Pakistan décident de régler leur différend en tête à tête et l'échange n'a rien à voir avec l'Iran. Désolé, je vois rien d'autre.

Mais si on réfléchit sérieusement à un bombardement nucléaire de l'Iran, ce qui n'est pas impossible, en est-on pour autant en route pour 20 ans dans le noir ? A lire la théorie en question, on se demande bien ce que les Américains vont bien pouvoir bombarder pour envoyer autant de suie et de fumée chimiques dans les hautes sphères de l'atmosphère... Car si le scénario "20 ans" était envisagé pendant la guerre froide, c'était pour plusieurs facteurs très importants : Les échanges, répliques graduées ou pilonnage systématique, étaient très importants, sur deux continents minimum, soit une très large zone de dévastation. Les échanges avaient lieu sur deux types de cibles, militaires et civiles, dans des pays où les cibles civiles impliquent des villes énormes, de véritables métropoles et mégapoles, constituées d'immeubles bourrés de composés plastiques et chimiques qui, en se consumant, rejettent une suie particulièrement tenace dans l'atmosphère, et bien souvent dans des gratte-ciels de plusieurs centaines de mètres concentrés sur des kilomètres ( vous imaginez les millions de tonnes d'isolants industriels, de plastiques, de peintures, etc.), de nombreuses usines chimiques et ptérochimiques, etc. Les cibles militaires, elles, étaient bien souvent entourées de forêts, champs, etc., dont la combustion se poursuivrait des jours et des jours voire des semaines après explosion ( tout comme les villes d'ailleurs) faute de personnel pour éteindre les incendies. Il y a un tas d'autres facteurs, mais partons de ceux-là, les plus évidents.

Déplaçons maintenant le théâtre d'opération en Iran. Quid des vastes forêts, des innombrables usines, des étendues de gratte-ciels et de villes tellement moderne que chaque maison contient quatre fois plus de matériaux susceptibles de provoquer des fumées persistantes que n'importe quel immeuble avant-guerre. On revient à bombarder des villes qui sont loin de contenir tout ce matériau et qui sont situées bien souvent au milieu du désert. Pour ce qui est des puits de pétrole, je vois mal les Américains les détruire, mais les Iraniens par désespoir oui. Cela dit, les Irakiens ont déjà fait le coup, les conséquences sont loin d'avoir changer le climat. Alors certes il y aurait de nombreux incendits terribles, mais les fumées rejetées par ces brasiers seraient moins persistantes en altitude. De plus, s'il s'agit uniquement de l'Iran, même l'intégralité du pays en ruine ne suffirait pas à provoquer un hiver nucléaire tel que présenté dans ce fabuleux pitch apocalyptique (Ce qui est d'ailleurs évident, d'où, sans doute, l'implication des Indiens et des Pakistanais qui, surtout les premiers, sont beaucoup plus susceptibles de faire des dégâts climatiques en cas de bombardement ). Ceci explique pourquoi après des centaines d'essais nucléaires sur tout le globe nous n'avons pas subi d'hiver nucléaire : Pour le provoquer, il faut de la suie. Pas de seulement de la fumée car elle se disperse très vite, non, de la suie, qui reste en altitude et bloque les rayons solaires. Et pour de la suie, il faut beaucoup de combustile, et plus il est plastique ou chimique, "mieux" c'est. Les explosions dans des déserts, la toundra ou l'océan, sous les montagnes ou dans l'espace n'ont pas créé beaucoup de suie, vous imaginez bien. Alors comparez la quantité de suie si vous brûlez l'Europe, la Russie et les Etats Unis ( là, vous le sentez l'hiver nuclaire des années 80 ? ) avec la quantité de suie si vous brûlez l'Iran. Voilà.

De plus, concernant ces hivers de 20 ans et plus, il faut savoir qu'un nombre important d'explosions nucléaires perturbe durablement la densité électrique, provoquant des orages électriques assez souvent ( alors imaginez quand l'hiver nucléaire a désséché tout ce qui restait de végétation... ) Ce phénomène provoquant de nombreux incendies longtemps après la fin de la guerre est également pris en compte dans "l'entretien" de la couche de suie et donc de l'hiver nucléaire. Quand bien même ce phénomène se produisait en Iran, il  n'y aurait rapidement plus grand chose à brûler. Je pense que là on a bien compris que bombarder l'Iran au nucléaire ne signe pas l'arrêt de mort climatique de la planète, ce qui ne veut pas dire que cela resterait sans conséquences ( observons par exemple les conséquences supposées de l'éruption islandaise cumulées à celles des incendies de forêts russes : Les températures n'ont cessé d'être en dehors des normales de saisons en positif ou négatif... particulièrement dommage à une époque où les Européens ont oublié qu'en hiver, il neige. Mais c'est un autre débat ). On pourrait éventuellement redouter un automne nucléaire, mais la disparitons d'espèces animales ou végétales serait presque accidentelle.

Bon, laissons maintenant de côté le pipot de Castro qui a voulu faire son malin en criant au loup et revenons au sujet de cet article : La Guerre Nucléaire dans Pax Europae. Pour les besoins de l'histoire et mon besoin personnel, il doit y avoir un hiver nucléaire. Alors là encore, est-on parti pour 20 ans de blablabla espèces animales et végétales blablabla... NON. En revanche, le monde va prendre cher. Et tout le monde. Car il est une chose que je disais dans l'article précédent et qui n'était pas complètement juste, car pas poussé jusqu'au bout.

Je disais que l'hiver nucléaire des années 80 serait essentiellement situé sur l'hémisphère nord. C'eut été vrai, au début, tout du moins. Car le refroidissment brutal des températures et sur une longue période ( plusieurs mois ) provoquerait un changement des courants marins et des vents ( coucou Gulfstream ! ), et donc un glissement lent mais inéluctable de la masse de suie... ailleurs, vraisemblablement vers le sud. Seulement pour passer d'un hémisphère à l'autre, il faut passer par l'équateur, où des températures sub-zéro tueraient la totalité de la végétation équatoriale et tropicale, incapable de résister à un tel froid, ni les pousses, ni les graines d'ailleurs. Et selon la période de l'année où cela se passe, même la végétation habituée à des refroiddsements pourraient ne pas survivre à une telle rigueur ( imaginez vos plantes d'été subissant soudain -20 degrés pendant cinq mois ) Cela a des conséquences sur les récoltes et les semences, évidemment, et donc sur les survivants de la guerre/famine/froidure qui doivent percer la croûte de glace de leurs rivières ( quand il y en a ) pour trouver de l'eau, ce qui est déconseillé aux survivants des échanges nucléaires puisque l'eau sous la glace sera vraisemblablement saturée de radiations. Bref, voilà pourquoi, dans les années 80, les gens se chiaient dessus, littéralement, et pourquoi des gens construisaient des abris antiatomiques dans leurs jardins. Si cela vous faisait sourire auparavant, j'espère que cette rapide et succinte explication saura vous faire réfléchir au sérieux de la chose. La psychose, lors de la crise de Cuba ou lorsque la Glasnost prit fin et que les tensions reprirent, était fondé sur ce postulat : La civilisation telle que nous la connaissons pouvait disparaître.

Mais nous sommes en 2011, ( bonne année ! ) La Guerre Nucléaire ne se prépare plus, ne s'envisage plus, comme il y a trente ans. Les arsenaux diminuent, les énormes bombes laissent la place à des missiles moins puissants, plus "précis", plus efficaces, et surtout moins chers. Les bombardements envisagés sont moins systématiques, plus ciblés, ces armes sont redevenues soit des armes complètement dissuasives, soit totalement tactique au dépend des missiles stratégiques ( bien que naturellement les deux soient toujours bien présents, au cas où ). Le monde n'est plus le même non plus, et l'Est-Ouest, ça ne marche plus avec des pays dotés du nucléaire comme la France d'un côté, la Chine de l'autre, l'Inde au milieu, la Russie au-dessus, etc. etc. En 2034 ma situation est un mélange des deux : Le monde n'est plus divisé en deux mais en plusieurs grands blocs monstrueux et pour la plupart armés de Nukes - ou pire ( ou mieux, selon le point de vue ). La guerre nucléaire, je l'ai déjà dit, ne démarre pas à la suite d'une escalade, et sa reprise après une courte pause n'est pas due non plus à un dérapage de la guerre mondiale mais à un échange plus "personnel" entre deux bélliégrants, dont un resté neutre dans la WW3, et qui n'a donc rien à voir avec les échanges nucléaires précédents. Ce scénario est à mon sens plus "crédible" que le gros échange massif qui continue à faire fantasmer tout le monde. Je lisais le roman 10 juin 1999 (Arc Light en VO ), et la guerre nucléaire commençait bien, une frappe limitée de missiles tactiques censée empêcher toute escalade, guerre contenue, dérapant à cause d'un Coup d'Etat ( scénario "fou de guerre" évoqué dans mon post précédent sur le sujet ) et d'une série de mécompréhensions, ça c'était chouette. Mais on se retrouvait de nouveau avec USA VS Russie boom boom et un dernier quart du livre décrivant l'invasion terrestre (et conventionenlle, donc, pas de nuke tactique sur les champs de bataille côté US ) quasi sans accroc de la Russie par les Américains. C'était drôlement vite expédié et ne s'intéressait pas trop aux conséquences climatiques possible, si on excepte un petit "oh, les premières neiges de septembre, fait frais, non ?" Deux pages avant la fin du livre. Ca c'était dommage, d'autant que les mécanismes de réponse etc. sont très bien décortiqués ( si on est capable de survivre au syndrôme Tom Clancy "Tout tout Tout je vous dirais tout sur l'hélicoptère/le missile nucléaire/la commission sénatoriale" ). De mon côté, je le confesse d'avance, je suis beaucoup moins technique et donc sans doute beaucoup moins crédible, mais j'aimerai pouvoir parler un peu de l'hiver nucléaire du XXIème siècle, celui qui est plus limité en taille et en dispersion, mais dont les conséquences seraient dramatiques pour les pays touchés et entraîneraient des choix au niveau international, celui qui sera subi par la moitié de la population humaine dans un monde ou il ne reste pas une poignée de survivants mais près de 9 milliards, un monde loin de Mad Max, un monde où des gens vivent encore bien et doivent prendre des décision sur comment aider, qui aider, en quelle mesure, combien est-on prêt à payer, quels efforts est-on prêt à consentir ? Doit-on travailler en équipe ? Avec toujours la tentation d'en profiter et de tirer la couverture à soi. Dans les années 80 et par corollaire dans une grande partie de l'imaginaire post-apo depuis, cela se produisait à l'échelle de petites communautés. J'aimerai aborder cela à l'échelle globale, même si ce n'est pas le sujet principal du tome 4. Cet élément y sera très important, notamment pour la note d'espoir qui le conluera ( sisi, vraiment ). Mais il n'est pas impossible que j'en tire une petite nouvelle... vous commencez à me connaître !

D'ailleurs à ce propos, j'avance à grands pas dans Europae et suis presque arrivé au bout de ma réécriture ( j'en suis au 17 octobre 2006, encore deux chapitres à écrire, un à réécrire complètement et ce sera bon, je pense ). Plus d'infos très bientôt :-)